Les Chroniques de Gaston

Découvrez les trois premiers épisodes des chroniques de Gaston. Récit de la vie d'un homme et d'une famille dont les valeurs morales ont inspirées le nom de notre association.

La Maison du musicien

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Actualités du monde musical

Le monde musical et le COVID 19

La pandémie mondiale a forcé toute une population à adapter son quotidien.

Les artistes, dont la plupart ont un statut précaire, ont été cruellement touchés, mais aussi les plus privilégiés. Personne n’a été épargné. La reconstruction de ce monde culturel est encore incertaine et mettra de longs mois voir des années à s’en relever.

Pour certains, de nouvelles formes de communications artistiques ont vu le jour, pendant que d’autres ont pensé tout abandonner.

C’est pourquoi, nous souhaitons, afin de prioriser nos futures actions, vous interroger sur ce que le Covid 19 a changé dans votre pratique artistique quotidienne ?

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Les chroniques de Gaston

La Maison Nahon Episode 1

Gaston Nahon naquit en 1909 de nationalité française en Algérie, dans le village de Palissy, non loin de Sidi Bel Abbes.

(...)


Benjamins d’une famille de trois Garçons, son père Moïse Nahon et sa mère Reïna Ben Hamou Nahon y tenaient une épicerie boulangerie qui avait pour enseigne : « La Maison Nahon » Ces mots avaient une signification bien particulière pour cette famille d’immigrés. Les premiers ancêtres de Gaston vivaient dans le nord de l’Espagne dans la province d’Oviedo.


En 1492, lors de l’inquisition, Isabelle la Catholique fit expulser tous les juifs et musulmans d’Espagne. Sa famille était alors devenue apatride, déchue pour toujours de sa nationalité. Après un long périple, ses ancêtres s'établissent à Tétouan, ville du nord du Maroc. Il y avait de véritables partages commerciaux, culturels et humains durant ces cinq siècles entre juifs et musulmans. Ils partageaient leurs repas plusieurs jours par semaine et dressaient tous les soirs un couvert supplémentaire pour celui qui souhaitait s’inviter. Ce pouvait être un voisin, collègue ou un simple voyageur, leur porte restait ouverte à tous et tous les soirs. Après un repas copieux, ils parlaient, chantaient et dansaient leurs souvenirs. S’il est un fait que leurs rites et leurs croyances étaient différentes, les communautés juives et musulmanes partageaient d’importants intérêts communs, comme le goût pour les mêmes plats, la musique et pour finir un profond besoin de solidarité.


En 1859, l’extrême misère d’une très grande partie de la population de Tétouan, ainsi que la guerre hispano marocaine ne laissèrent guère d’autres choix au grand père de Gaston, Menahem Nahon, que de quitter ce pays qui était devenu celui de ses ancêtres. En 1860, Menahem et sa femme Fadouenia posèrent leurs Valises à Palissy en Algérie. Avec pour unique rêve, celui de s’y établir pour de bon et d’y construire une maison quel qu'en soit le sacrifice. Ils avaient à peine 18 ans.

Menahem plaçait les valeurs humaines et familiales au dessus de tout, même de la religion. Pour lui et sa femme, être juif signifiait : Apatride.

Leurs traditions et souvenirs comptaient plus à leurs yeux que la croyance en tant que telle. Ils voulaient que leurs fils aient la promesse d’un avenir sans jugement, ni crainte d’être à nouveau expulsé. Alors ils leur transmettent l’amour du travail sans relâche, le respect de l’autre et leur capacité à accueillir toute personne qui en avait le besoin. Comme ses ancêtres, Moïse parlait l’arabe et l’espagnol mais son père, l’obligea à ajouter à cette liste le français. Il ne fallait rien oublier du passé, mais avoir l’obligation de s’adapter au présent.


En 1870, Menahem et femme reçurent la citoyenneté française grâce au décret Crémieux. En était-il pour autant soulagé ? Peut-être.

Très jeune, le père de Gaston, se mit à travailler jour et nuit avec son père pour que l’épicerie boulangerie Nahon devienne rentable. Menahem en confiait la direction à ses fils dans les années 1890. Ils avaient peut-être aujourd’hui une citoyenneté mais cela ne changeait rien. Menahem disait que cette épicerie était une maison, celle de la tolérance, du partage mais avant tout, du souvenir. Alors Moïse fit changer l’enseigne et inscrivit entre les mots épicerie et boulangerie :

« Maison Nahon »


Marianne Boucher

Les trois frères Episode 2

Moïse et son frère Juda passaient leur journée à faire prospérer l’épicerie « maison Nahon » et commençaient à se faire un nom dans le petit village de Palissy.

(...)

En 1901 Moïse se mariait avec Reina Benhamou, et ils donnèrent naissance à trois garçons. L’ainé, Jacques Jacob en 1903, deux années plus tard Charles Isaac venait au monde et pour finir le benjamin, Gaston Menahem en 1909. Chaque enfant mâle portait l’illustre prénom d’un homme de la famille décédé, pour perpétuer son souvenir.


Moïse et Reina souhaitaient que leurs fils fassent des études, Ils n’étaient pas riches mais ils placèrent toutes leurs économies afin de leur assurer un avenir prospère. Jacques choisit d’apprendre le métier de banquier tandis que Charles se destinait à la médecine et ferait la fierté de toute la famille. Quand à Gaston, il avait une véritable fascination pour les voitures et plus précisément, la mécanique.


Allait il devenir ingénieur ? Mais non. Il aurait pu étudier comme ses frères, mais il était bien trop pressé ! il serait mécanicien et cela lui convenait très bien. Il partirait à Sidi Bel Abbes trouver une place dans un garage et apprendrait à monter et démonter ces machines de fer qu’il aimait tant.


En attendant, il préférait étudier les gens.

Gaston était un autodidacte en presque tout, ce qui le rendait libre de s’inventer plus grand. Parlant très jeune l’espagnol l’arabe et le français, là où Gaston passait, les portes s’ouvraient.


La musique et le théâtre le rendaient heureux. Véritable chanteur d’opérette de salle de bain, Il dansait devant son miroir et sifflotait du matin au soir. Toujours élégant, il aimait plaire aux femmes et elles le lui rendaient bien.


Passionné de théâtre et d’opérettes, il allait plusieurs soirs par semaine à Sidi Bel Abbes avec ses frères et son cousin Aron, assister aux dernières représentations. Dans ce théâtre, tous les courants musicaux étaient produits, y compris l’opéra. Des compagnies espagnoles venaient pour une durée d'un mois et jouaient tous les soirs un spectacle différent jusque tard dans la nuit. Puis ils rentraient au petit matin ivre de rencontres, de musique et d’histoires fantastiques.


En 1928, à l’âge de 19 ans, Gaston eu l’obligation d’effectuer deux années de service militaire dans le régiment des zouaves. Cette expérience, l’avait profondément changée. De dandy insouciant avide d’art et de rencontres, il en était revenu introverti et désireux de se construire une stabilité financière solide et durable.


À son retour, la famille déménageait à Tlemcen et Moïse acheta pour ses fils Jacques et Gaston, l’épicerie « L’Aureole », Jacques ayant abandonné ses rêves de banquier et Gaston, ses illusions. Il devait aider sa famille à la création d’une nouvelle « maison des souvenirs », symbole de réussite et d’intégration.


Marianne Boucher

La serveuse au piano Episode 3

Gaston et son frère Jacques avaient à coeur de prouver à leur père leur valeur. Alors pendant plus de quatre ans, ils travaillèrent sans relâche dans l’épicerie familiale.

(...)

En 1934, l’épicerie de part son emplacement rue de France, non loin de la place principale de Tlemcen en Algérie, rencontrait un véritable succès. Les produits proposés étaient de qualité et la famille organisait des dégustations avant achat, accompagnées d’un café pour tous les clients qui le souhaitaient.


Charles, troisième frère de Gaston, était parti faire ses études de médecine en France, et faisait son grand retour en Algérie cette même année. Il venait de publier un livre qu'il dédicaçait à ses parents et à ses frères qui avaient tant contribué à financer sa brillante réussite.

Pour fêter l’événement, toute la famille s’était réunie à l'Hôtel du Progrès pour un dîner de retrouvailles. Cette institution était tenue par la famille Farouz implantée à Tlemcen depuis plusieurs générations.


À la fin du repas, Gaston n’avait d’yeux que pour la jolie serveuse qui leur avait présenté les plats.

Pendant qu’il dégustait son digestif en compagnie de ses frères, la jeune femme s’était installée au piano droit du grand salon et se mit à interpréter la chanson de Lucienne Boyer : « Parlez moi d’amour ». Le silence s'installait progressivement et seul le bruit des glaçons accompagnaient la chanson. Elle s’appelait Léonie, et était la septième et dernière enfant de la famille Farouz.

Quand la soirée touchait à sa fin, Gaston prit son courage à deux mains pour la remercier de ces merveilleux instants partagés. Il lui promit de revenir le lendemain, et c’est ce qu’il fit, ainsi que tous les jours suivants.


Léonie avait une démarche chaloupée et un caractère bien trempé. Toujours élégante, elle parlait avec beaucoup d’esprit et de curiosité. Au bout de quelques semaines seulement, Gaston et Léonie se fréquentaient officiellement.


Au début de l’année 1935, alors qu’il était sur le point de la demander en mariage, le père de Gaston, Moïse Nahon décédait brutalement. La tristesse engendrée par la disparition de cet homme qu’il admirait, ainsi que ses obligations liées à la succession, lui fit oublier pendant de longs mois, sa promesse d’union.


Ce n’est qu’au mois de Novembre 1935 qu’il épousait enfin Léonie Farouz, la serveuse au piano qu’il aimait tant. La même année, Gaston ouvrait une épicerie rue de la Mouya dans le centre de Tlemcen, pendant que Léonie donnait des cours de piano et continuait à aider ses parents.


Gaston n’avait pas oublié sa fascination pour la mécanique. Alors, en 1939, après avoir fait prospérer l’épicerie pendant quatre longues années, il s’apprêtait à la vendre pour réaliser son rêve d’enfant, ouvrir un garage automobile. Au mois de Mai de cette même année, Gaston et Léonie eurent enfin la joie d’être parents et célébraient la naissance de leur fille Nicole Reina Nahon.


Malheureusement, leur bonheur fut de courte durée, la guerre mondiale venait d’être déclarée.

En Août 1939, Gaston eut l’ordre de rejoindre le régiment des Zouaves à Paris et la mort dans l’âme, d’abandonner sa femme et sa petite fille.


Marianne Boucher

Anecdotes musicales

L’envers du décor : « Nous n’irons plus au bois »


Au départ, la chanson appartenait au répertoire des brunettes, petites compositions à la mode au 17e et début 18e, à voix seule, souvent champêtres et légères. Le bois est un symbole familier de la rhétorique du badinage et la musique est issue du plain-chant, comme de nombreuses mélodies traditionnelles.

Son cadre bucolique, ses animaux bienveillants, ses fruits, ses fleurs, un monde enchanté mais familier : Les atouts furent réunis pour qu’à partir du 19e siècle, cette ronde devienne une chanson enfantine, très populaire dans les milieux artistiques.

On y trouve un écho dans « Jardins sous la pluie » de Debussy, par exemple.

A chaque couplet, un enfant entre dans le cercle et choisit celui ou celle qui a sa préférence, l’embrasse avant de reprendre sa place dans la ronde. Au couplet suivant, c’est l’élu(e) qui choisira à son tour.


Les enfants questionnent peu le sens de ces lauriers coupés et l’allusion sexuelle implicite contenue dans le dernier couplet :

“Car les lauriers du bois sont déjà repoussés”.

Cette dernière évoque notamment, de façon détournée, l'interdiction des maisons de prostitution pendant une partie du règne de Louis XIV. Sous l'influence de Madame de Maintenon et suite à une épidémie de maladies vénériennes, le roi signe l'ordonnance du 20 avril 1684 qui renforce les pouvoirs de la police et instaure le délit de prostitution. Les maisons de passe arboraient en effet autrefois une branche de laurier au-dessus de la porte.


Il existe aussi une version Francis Blanche qui, dès le 2e couplet, dérape: empêché par le gendarme d’embrasser sa cousine, il mange une glace, zigouille le bossu et fait pipi contre un arbre.

Une autre façon de danser la ronde ...


Mireille Hastings

Les chansons de Gaston

Au clair de la lune : "L'envers du décor"

Au clair de la lune

Elle fait partie des voix-de-ville, c'est-à-dire des chansons créées, transformées ou lancées en milieu urbain.

Elle fut entendue pour la première fois vers 1790 aux abords du Théâtre de la Foire : 4 couplets de vaudeville par un auteur inconnu, sur une contredanse apparue entre 1775 et 1780. Les compositeurs Boieldieu et Hérold utilisèrent cette chanson populaire dans leurs opéras-comiques. Les artistes Deburau et Chiarini lancèrent vers 1820 sur le boulevard du Temple la mode du Pierrot, personnage inspiré de la commedia dell'arte, ce qui renforça la popularité de la chanson.


Certains eurent des scrupules à proposer cette histoire galante où l'on passe de “l’amour de Dieu” au “Dieu d’amour” aux enfants. De nombreuses connotations peuvent être relevées dans cette chanson. Avec des termes tels que « Lubin » (moine dépravé), « chandelle », « battre le briquet » (désigne l'acte sexuel) et le « dieu d'amour », les paroles recèlent donc des sous-entendus sexuels. Ainsi, rallumer le feu (l'ardeur) lorsque la chandelle est morte (l'organe sexuel mâle au repos) en allant voir la voisine qui « bat le briquet » peut être interprété de façon lubrique. En effet, l'expression "battre le briquet" désigne l'acte sexuel.


La chanson fut expurgée des 2 derniers couplets puis augmentée de nombreuses variantes allant de la bondieuserie au détournement scatologique. Dès 1877, la chanson figure dans un ouvrage destiné aux enfants de la communale. Puis on commence à l'employer pour l'apprentissage du solfège : sa construction mélodique - notes dans la succession de la gamme puis double descente dans la 2e phrase musicale - s’y prête aisément.

Aujourd’hui, elle a été reprise par quelques rappeurs dans des versions plus sombres.


Mireille Hasting

Bob Marley

"I shot the sheriff"

Les chansons de Gaston : L’envers du décor !


Nous avons (presque) tous trémoussé notre alors jeune popotin en écoutant du reggae et en particulier le tube planétaire « I shot the sheriff »

(...)

J’avais une prédilection pour la version Clapton sans vraiment écouter les paroles mais Myriam Perfetti dans l’hebdomadaire « Marianne » nous éclaire d’une version moins glorieuse et plus personnelle que l’officielle invoquée alors par Bob Marley : il ne s’agirait pas d’une vengeance contre un flic sadique et raciste mais d’un plaidoyer contre la contraception. N’oublions pas que nous sommes au début des années 70 et le sujet enflamme les discussions dans de nombreux pays. De surcroît, prendre la pilule est un péché pour la religion rasta et il semble que Marley aurait voulu « tuer » le docteur qui prescrivait la dite pilule à sa nouvelle maîtresse avec laquelle il voulait des enfants.

Dans le 1er couplet, on peut lire Sheriff John Brown always hated me / …./ Every time I plant a seed / He said kill it before it grow (le sheriff J.Brown m’a toujours haï/ … / Chaque fois que je plante une graine/ Il me dit Massacre-la avant qu’elle ne pousse) Le grand écart d’interprétation des paroles est amusant. Je ne sais pas quelle est la bonne mais Bob Marley a eu 11 enfants de 8 femmes différentes.

Il a quand même réussi à planter quelques graines, mais je ne remuerai plus mon derrière avec la même insouciance sur cette musique.

Mireille Hastings

Stings

"Every Breath you take"

Les chansons de Gaston - L'envers du décor

Cette chanson du groupe Police a, depuis sa parution en 1983, engrangé 9 millions de diffusions radio ou télévision. Pour être populaire, elle n’en est pas moins assez mal comprise.

(...)

En effet, elle est souvent jouée lors de mariages comme symbole d’amour durable et bienveillant. Pourtant, il faut regarder plus attentivement la phrase, digne d’un « psychopathe » : Every breath you take , I’ll be watching you (A chacune de tes respirations, je j'observerai). Déjà beaucoup moins bienveillant… Sting, l’auteur du tube, est connu à l’époque pour son implication dans de nombreuses causes humanitaires et est une star adulée. Mais Myriam Perfetti dans “Marianne” nous révèle qu’il était aussi très dépressif. Divorce douloureux et profond désaccord avec les 2 autres membres du groupe.

Au moment de l’enregistrement de leur 5e et dernier album “Synchronicity” sur lequel se trouve le morceau, il est stipulé devant avocat, que chacun participera au projet commun sans jamais être obligé de croiser les autres membres du groupe. Belle ambiance créative! Une nuit, Sting trouve rapidement la ligne mélodique et des mots qu’il qualifiera plus tard de « sinistres », tournant autour du verbe « to watch » répété de nombreuses fois. On veille et très vite on surveille, jaloux maladif, amoureux éconduit, sombre présage ?

Sting confirmera en interview: « c’est une petite chanson méchante, perverse et diabolique sur la surveillance et le contrôle qu’on exerce sur une autre personne, sur la présence étouffante que l’on fait subir à l’être aimé et qui transforme l’amour en torture réciproque ».

La voix suave de Sting la rend encore plus troublante.

Bref, au prochain mariage, changez la playlist..

Mireille Hastings

Marian Anderson

LES ARTISTES DE GASTON - “L’envers du décor”



Marian Anderson est une contralto américaine née en 1897 en Oregon qui a chanté sous la direction de chefs prestigieux tels que A.Toscanini, D. Mitropoulos ou E. Ormandy. Même si l’histoire de la musique a retenu son nom, les débuts sont difficiles :

(...)

A l'âge de 6 ans, elle intègra une chorale puis en 1927, elle se présenta à la Philadelphia Music Academy mais l’inscription lui fut refusée à cause de sa couleur de peau. Devenue une artiste internationae de renom, elle devait chanter en 1939 devant Eleanor Roosevelt, grande admiratrice de Marian Anderson, au prestigieux

Constitution Hall. Cependant le projet ne put aboutir : En effet, aucun artiste de couleur n’était autorisé à franchir ses murs ! Qu’à cela ne tienne : La première dame des Etats-Unis, furieuse, organisa alors la venue de la chanteuse devant le Lincoln Memorial et celle-ci interpréta des chansons américaines et des airs d’opéra devant

75000 personnes. Marian Anderson fut la première artiste noire à être admise au Metropolitan Opera et chanta l’hymne national américain lors de l’investiture de John F.Kennedy en 1961.

On pourrait penser que les années 60 et la notoriété de l’artiste eurent raison des

portes closes devant la couleur de peau. Grave erreur ! L’accès d’un prestigieux hôtel québécois lui fut refusé en 1964.

Marian Anderson traça la voie aux artistes lyriques Leontyne Price et Jessye Norman

qui eurent aussi à souffrir de préjugés raciaux. Elle mourut en 1993, à 96 ans. C’est cela aussi, “l’envers du décor”


Mireille Hastings

MILES DAVIS

LES ARTISTES DE GASTON - “L’envers du décor”

L’un des plus beaux albums de jazz jamais enregistrés Kind of Blue sort en août 1959. Très créatif, inspiré, parfois planant, bourré d’improvisations coruscantes.

En 1958, M. Davis avait formé son groupe avec John Coltrane, sax ténor, Cannonball Adderley sax alto, Bill Evans, pianiste,Paul Chambers, contrebassiste et Jimmy Cobb,batteur.

(...)

Ils jouent plutôt des bebop, style que Davis ne trouve pas adapté pour exprimer toute sa créativité. Il se tourne alors vers un jazz modal, utilisant des séries de gammes plus promptes à l’improvisation. Premiers essais dans l’album Milestones puis préparation de l’album Kind of Blue, basé sur cette approche modale. Miles Davis commence à personnaliser ses instruments dans les années 1950. Pour les séances d’enregistrement de 1959, il joue une trompette recouverte d’un vernis bleu-vert, “kind of blue” qui donnera son titre à l’album.

Quelques jours après la sortie du disque, Miles Davis et son groupe jouent au Birdland, célèbre boîte de jazz à New York. Ce concert est d’autant plus important qu’il est retransmis à la radio. A l’entracte, M.Davis sort de la salle pour raccompagner une amie, blanche, jusqu’à son taxi puis prendre l’air devant le club par cette chaude nuit d’été mais un policier lui demande de circuler. Miles Davis montre alors son nom, écrit en grand sur la façade du club, explique qu’il y donne un concert et qu’il n’a donc pas à bouger. Prenant la réponse du musicien pour de l’arrogance, le policier lui assène un coup de matraque sur le crâne. Davis est emmené au commissariat où son avocat et une journaliste, témoin de l’altercation entre les 2 hommes, réussissent à le faire libérer pour le conduire à l’hôpital où on lui fera dix points de suture.

Pendant ce temps, son groupe assure la 2e partie du concert qui devait être un tournant important dans la carrière et l’oeuvre de Miles Davis, ce qu’il n’aura pas l’occasion de vérifier. Alors qu’il commençait à apprécier certains changements de mentalité qui rendaient plus facile la vie quotidienne des noirs américains , cet épisode marque profondément Miles Davis, renforçant son amertume et son cynisme, d’autant plus que cette altercation eut lieu à New York et non pas dans un état du Sud. 25 ans plus tard, il consacre un album entier You’re under arrest à cette violente rencontre d’août 59.

C’est aussi cela, "l’envers du décor" !

Mireille Hastings